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QVCT, sujet bullshit du moment ? Par Corinne Diemunsch

Tadam ! Le mois de Juin arrive à grands pas et, avec lui, la semaine de la QVCT. Sauf que derrière cet acronyme devenu extrêmement populaire, le sens est souvent différent et la portée qu’il inspire encore plus. Car, oui, la QVCT embarque une multitude de choses.

🤸"La Qualité de Vie au Travail n'est pas seulement un confort, c'est la clé pour un corps et un esprit sains, optimisant ainsi performance et bien-être au quotidien. En tant qu'ostéopathe et coach sportif, je constate chaque jour l'impact direct de la QVCT sur la santé physique et mentale de mes patients. Un environnement de travail favorable, avec une attention portée à l'ergonomie, à la posture et à l'équilibre entre activité professionnelle et activité physique, permet non seulement de prévenir les troubles musculo-squelettiques et les blessures, mais aussi de stimuler la motivation, la concentration et la productivité. Investir dans la QVCT, c'est donc investir dans la santé et la performance de chacun." Audrey Bucaille.

Petit tour du paysage; reprenons depuis le début 🌀 

🕑La petite histoire de la QVCT

C’est le 9 décembre 2020 que la Qualité de Vie et des Conditions de Travail est apparue avec l'Accord National Interprofessionnel (ANI) sur la santé au travail. Entériné par la loi du 2 août 2021 “pour renforcer la prévention en santé au travail”, c’est l'approche, de ce qui relevait précédemment de la QVT, qui évolue pour englober toujours plus de sujets : du climat social et du dialogue avec les parties prenantes à l’engagement et la motivation des salariés, en passant par la réduction du stress, de l’absentéisme et du turnover, l’attractivité et la fidélisation des talents ; sans oublier naturellement l’image et la réputation de l’organisation.

La santé n’est pas en reste vue qu’elle est au cœur du sujet avec la prévention des risques psychosociaux (RPS) ou encore des troubles musculo-squelettiques (TMS). La QVCT s'empare jusqu’à la compétitivité et la performance économique de la structure et joue un rôle dans l’innovation et la créativité. Pfiou ! Toujours là ?

Retour dans les années 1950. 

Les prémices du sujet apparaissent dans les écrits d’Eric TRIST et de Frédéric EMERY, au Tavistock Institute of London. En 1972 à New York, c’est lors d'une conférence que le terme QVT est mentionné pour la première fois. Dans le même temps apparaît l'intérêt pour la santé psychologique au travail. La Qualité de Vie au Travail désigne alors les actions que les entreprises mettent en place pour améliorer le confort de leurs collaborateurs en vue d'accroître à la fois leur bien-être et leur performance professionnels. En France, c’est dans les années 2000 que la QVT fait son apparition.

💁Pour Mélissa PAGES, Responsable du développement des partenariats chez Actistress “la Qualité de Vie au Travail est bien plus qu'un simple acronyme ou une notion abstraite. C'est un accord national qui a été réfléchi, posé et construit. C’est la manière dont cet accord est utilisé par les entreprises qui est bullshit. Il y a un manque de repères clairs : “Tout objectif flou conduit irrémédiablement à une connerie précise" ! Il faut vraiment comprendre ce qu'il y a derrière cet acronyme, comment en tant qu'entreprise je me projette ; créer un plan d'actions concret avec une logique d'investissement derrière. La QVCT, c'est l'essence même de l'épanouissement au travail, la clé de voûte de la productivité, et le pilier d'une culture d'entreprise saine et dynamique. Pour moi, elle représente avant tout l'engagement authentique envers le développement de chaque individu au sein de l'organisation. C'est la conviction que le travail ne devrait pas seulement être une source de revenus, mais aussi un lieu où chacun peut s'épanouir, se sentir valorisé et contribuer pleinement à la réalisation des objectifs communs. Je suis convaincue que la QVCT passe avant tout par l'apprentissage continu et le développement professionnel. Offrir des opportunités de formation, de croissance et d'avancement à chaque membre de l'équipe est essentiel pour cultiver un environnement où l'excellence est encouragée et récompensée.”

Histoire de génération ?

Ayant vécu une expérience peu concluante, l’une de mes nièces (27 ans) me disait la semaine dernière que, pour les jeunes actifs, la Qualité de Vie au Travail est primordiale dans le choix d’un employeur et qu’une organisation dans laquelle les managers ne disaient pas “Bonjour” à leurs collaborateurs et/ou leur “râlaient dessus” sans leur dire ce qui ne convenait pas, c’était rédhibitoire. Euh… qui a envie d’être confronté à ce type de comportement dans sa vie professionnelle comme dans sa vie privée d’ailleurs ? 

Si la Qualité de Vie au Travail est cruciale pour ces populations, c’est parce qu’ils valorisent, et le font savoir, un équilibre entre vie professionnelle et personnelle. Pour eux, des conditions de travail favorables, telles que la flexibilité des horaires, le télétravail et un environnement de travail sain, sont essentielles pour leur bien-être et leur épanouissement. Ils voient la QVT comme un reflet de l'engagement de l'entreprise envers le bien-être de ses employés, ce qui influe directement sur leur motivation, leur productivité et leur fidélité envers l'entreprise.

🌸Lucille Wattraint, Fondatrice de Juners, spécialiste de la parentalité en entreprise, nous dit que, pour elle, “la QVCT c’est tout simplement l’intégration de la VIE dans le travail. Avant, nous avions une vie morcelée, avec le travail d’un côté, le perso de l’autre ; voir même les enfants à part, la famille ou encore les amis aussi. Tout était cloisonné. Le monde étant en profond changement, les crises se succèdent et les gens changent. Il y a donc une plus grande porosité entre tout cela, pour donner la VIE. Pour moi la QVCT, œuvre au bien-être du collaborateur dans sa vie.”

Sacrées Conditions de travail !

Et donc non, on s’en doutait, la QVCT n’est pas l'apanage d’une génération plus que d’une autre. Et d’ailleurs le "C" de conditions tend à prendre du galon avec l’âge du personnel navigant. Il est, dans tous les cas, capital car il englobe l'ensemble des facteurs environnementaux et organisationnels qui ont un impact direct sur le bien-être et la santé des salariés. Les conditions de travail concernent à la fois les aspects matériels (ergonomie du poste de travail, outils et équipements) et immatériels (organisation du travail, charge de travail, relations interpersonnelles).

⚕️Des conditions de travail de qualité sont essentielles pour garantir la sécurité, la santé et le bien-être des salariés. Un environnement de travail sain et sécurisé favorise la productivité, réduit les risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles, et contribue à l'engagement et à la motivation des salariés. De plus, des conditions de travail optimales permettent de prévenir le stress, l'épuisement professionnel (burn-out) et les troubles musculo-squelettiques, qui sont des problématiques de plus en plus préoccupantes dans le monde du travail.

En intégrant le "C" de conditions (de travail) dans l’acronyme QVCT, on reconnaît l'importance de créer un environnement de travail favorable à la fois sur le plan physique et organisationnel. Cela implique une démarche proactive de la part des entreprises pour évaluer et améliorer continuellement les conditions de travail, en prenant en compte les besoins et les attentes des salariés. En fin de compte, des conditions de travail de qualité sont un élément clé pour assurer une QVT globale et contribuent à la performance et à la pérennité de l'entreprise.

🛎️Petit tour du côté du Droit

Rachel Nizet, Avocat à la Cour, précise que “selon le Code du Travail, les entreprises ont une obligation de sécurité envers leurs employés. Elles doivent protéger la « santé physique et mentale des travailleurs ». Selon l’article L2242-1 du Code du Travail, les entreprises -dotées d’organisations syndicales représentatives - ont l’obligation de lancer annuellement, et au minimum une fois tous les quatre ans (si mise en place d’un agenda social), une négociation obligatoire sur la QVCT, concept qui vise à inciter les employeurs et les partenaires sociaux à aller au-delà de la seule problématique de santé, pour rechercher le bien-être des salariés au travail. Ce thème de négociation peut s’avérer être un levier efficace pour la structuration et le développement du travail à distance, la prévention des risques psychosociaux, le handicap dans l’entreprise, les mobilités professionnelles et géographiques des salariés ou encore la reconnaissance et la valorisation des salariés dans l’entreprise, etc. Il s’agit d’enjeux majeurs pour l’amélioration des conditions de travail et permettre aux entreprises de gagner en performance.”🎓

QVCT, à qui la faute ?

🤦Mais qui est chargé de la QVCT dans l’entreprise ? Sujet en vogue mais aussi sujet “fourre tout” et vaste cauchemar quand on veut sincèrement y plonger son nez ; hier QVT, aujourd’hui QVCT et demain ???, la question de savoir qui est réellement en charge de la QVCT en entreprise reste souvent floue et sujette à débat. Est-ce le dirigeant, le Comité Social et Économique (CSE), les Ressources Humaines (RH), ou bien une responsabilité partagée par tous les acteurs de l'entreprise ?

🐝Pour Violaine Fauvarque, responsable marketing, communications et RSE chez Alland & Robert, une société spécialisée dans la fabrication de gommes naturelles pour les industries alimentaires, cosmétiques et pharmaceutiques "ce sont surtout les Ressources Humaines qui travaillent sur ces sujets. La QVCT est d’ailleurs l’un des leviers qui permet de renforcer l’image de la marque employeur. Le département Qualité peut intervenir selon les sujets, notamment ceux liés à la santé et la sécurité au travail. Enfin, le département RSE est également concerné car la QVCT permet à l’entreprise de concilier les nombreux défis du monde du travail d’aujourd’hui : quête de sens des salariés, transformation des métiers, inclusion, et bien sûr transition écologique et sociale."🌿

🧑La responsabilité du dirigeant

Il est indéniable que la culture d'entreprise et les valeurs émanent souvent du sommet de la hiérarchie. Ainsi, le dirigeant joue un rôle crucial dans la promotion d'un environnement de travail sain et équilibré. Cela passe par la mise en place de politiques favorables à la QVCT, l'allocation de ressources adéquates et la promotion d'une culture du bien-être au sein de l'organisation. 

Néanmoins, la réalité démontre que tous les dirigeants ne considèrent pas la QVCT comme une priorité, mettant souvent en avant des objectifs purement économiques au détriment du bien-être des salariés.

L'implication du CSE

Le Comité Social et Économique, en tant qu'organe représentatif des salariés, devrait également jouer un rôle important dans la gestion de la QVCT. Il est censé être à l'écoute des besoins et des préoccupations des employés, et à ce titre, il devrait être un acteur clé dans la mise en place de mesures visant à améliorer la qualité de vie au travail.

Cependant, dans de nombreuses entreprises ou organisations, le CSE ou CSA peut être confronté à des obstacles tels que des ressources limitées ou un manque de soutien de la part de la direction, ce qui limite son efficacité dans ce domaine.

Les Ressources Humaines

Les RH sont souvent considérées comme les gardiennes du bien-être des salariés au sein de l'entreprise. Elles sont chargées de recruter, de former et de maintenir une force de travail compétente et motivée. Par conséquent, elles jouent un rôle essentiel dans la promotion d'une QVCT positive. Cela inclut la gestion du stress, la prévention du harcèlement, la promotion de l'équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, ainsi que la mise en place de programmes de développement professionnel. 

Cependant, les RH peuvent également être perçues comme étant davantage alignées sur les intérêts de l'entreprise que sur ceux des employés, ce qui peut parfois limiter leur capacité à agir de manière indépendante dans ce domaine.

Une responsabilité partagée

Il est clair que la QVCT ne peut être entièrement déléguée à un seul acteur. Il s'agit plutôt d'une responsabilité partagée entre la direction, le CSE, les RH et tous les membres de l'organisation. Chacun de ces acteurs doit prendre conscience de son rôle dans la promotion d'un environnement de travail sain et équilibré, et travailler ensemble pour identifier les problèmes, mettre en œuvre des solutions et évaluer leur efficacité. 

"L’accord QVTC est le résultat de négociations menées avec les partenaires sociaux dès qu'il y en a : organisations syndicales, représentant du personnel, salarié mandaté par le Comité Social et Économique (CSE). La direction peut également décider d’impliquer les salariés en organisant, par exemple, un référendum, des questionnaires sur la qualité de vie au travail, des groupes de travail, … c’est un sujet qui devrait être consensuel, même s’il peut paraître un peu flou. Il est important d’avoir un vrai dialogue social autour de la QVTC" précise Rachel NIZET.

En clair, une approche collaborative et holistique est nécessaire pour garantir que la QVCT soit véritablement prise en compte dans toutes les décisions et initiatives de l'entreprise.

En somme :

  1. La direction doit donner l'exemple en plaçant la QVCT au cœur de ses préoccupations stratégiques. Elle doit fixer des objectifs clairs en matière de bien-être des employés, allouer les ressources nécessaires et encourager une culture organisationnelle qui valorise le bien-être et l'équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.
  2. Le CSE représente les intérêts des salariés et est en première ligne pour identifier les problèmes de QVCT au sein de l'entreprise. Il doit être impliqué dans les processus décisionnels et consulté sur toutes les questions relatives au bien-être des employés. De plus, le CSE peut jouer un rôle actif dans la promotion de programmes et d'initiatives visant à améliorer la QVCT.
  3. Les RH sont responsables de la mise en œuvre des politiques et des programmes liés à la QVCT. Elles doivent veiller à ce que les politiques de recrutement, de formation, de gestion du stress et de l'équilibre vie professionnelle-vie personnelle soient alignées sur les objectifs de bien-être des employés. De plus, elles doivent être à l'écoute des besoins des salariés et agir comme un canal de communication entre la direction et le personnel.
  4. Les managers jouent un rôle crucial dans la promotion de la QVCT au quotidien. Ils doivent être formés pour reconnaître les signes de stress ou de mal-être chez leurs subordonnés, encourager une communication ouverte et constructive, et promouvoir un environnement de travail inclusif et respectueux.
  5. Les employés ont également leur part de responsabilité dans la promotion de leur propre QVCT. Ils doivent être proactifs pour signaler les problèmes de santé mentale ou de stress, utiliser les ressources mises à leur disposition par l'entreprise, et participer activement aux initiatives de bien-être proposées.

Conclusion

En conclusion, la QVCT en entreprise est une responsabilité partagée qui nécessite l'engagement et la collaboration de tous les acteurs de l'organisation. En travaillant ensemble, en partageant les informations et en mettant en œuvre des initiatives adaptées, il est possible de créer un environnement de travail où chacun se sent valorisé, soutenu et épanoui. La reconnaissance de cette responsabilité partagée est essentielle pour faire de la QVCT une priorité au sein de l'entreprise et pour garantir le bien-être et la productivité des employés. 💪

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